Catherine VIDAL

Neurobiologiste, directrice de recherche à l'Institut Pasteur

  • Ses principales recherches ont porté sur les mécanismes physiologiques de la douleur ; le rôle du cortex frontal dans la mémoire et l'attention ; les pathologies des fonctions cognitives associées au SIDA. Son thème de recherche actuel porte sur la physiopathologie des fonctions cognitives dans les maladies à  prions. Catherine Vidal se consacre également à la vulgarisation scientifique à travers des conférences et des publications dans les médias. Son intérêt porte sur les rapports entre science et société, en particulier à propos des questions concernant le cerveau, le sexe et le déterminisme en biologie

    CERVEAU, SEXE ET LIBERTE

Publications
"Cerveau, sexe et pouvoir" (par C.Vidal et D. Benoit-Browaeys, Editions Belin, 2005, Prix de l'Académie des Sciences Morales et Politiques),
 "Féminin/Masculin : mythes et idéologie" (Editions Belin, 2006),
 "Hommes, femmes : avons-nous le même cerveau ? " (Le Pommier, 2007).
 "" (DVD, Editions Gallimard/ CNRS, Collection "La recherche nous est contée", 2007)
 Les filles ont-elles un cerveau fait pour les Maths ? Paris, Le Pommier, 2012 
Dans « Hommes, femmes, avons-nous le même cerveau ? » éditions le Pommier,, Catherine Vidal, neurobiologiste et directrice de recherche à l’Institut Pasteur, épingle les interprétations simplistes et les discours sexistes.

Les hommes et les femmes naissent-ils avec des aptitudes différentes ?
A ressasser les stéréotypes ancrés dans nos mentalités, on pourrait croire que les femmes sont, de façon innée, douées pour le langage, émotives, sociables et multitâches, mais peu logiques et inaptes à se repérer dans l’espace. Les hommes auraient le sens de l’orientation, la bosse des maths, un esprit compétitif et la faculté de diriger, bien qu’ils aient de la peine à effectuer deux choses à la fois. Faux ! Grâce à de nouvelles connaissances sur le cerveau, il est prouvé que ces affirmations sont erronées.

Comment expliquer alors les différences que nous observons au quotidien ?
Ces aptitudes ne sont ni innées ni propres au sexe. Le cerveau se façonne au gré de l’histoire de chacun. A la naissance, 10% des connexions entre les neurones sont présentes et 90% des connexions restantes se fabriquent en interactions avec l’environnement, l’influence de la famille, de la société et de la culture. Chez les enfants qui apprennent à jouer du piano, les régions du cerveau qui contrôlent les doigts et l’audition seront plus épaisses. Cette malléabilité du système nerveux, spectaculaire durant l’enfance, se poursuit tout au long de la vie.

Est-ce la société qui forge des normes associées au féminin et au masculin ?
En effet. Dès la naissance, les parents et le contexte social et culturel tendent à sexuer l’environnement de l’enfant. Traditionnellement, les petites filles restent à la maison, apprennent à ranger et à être disciplinées à l’école. Les petits garçons évoluent plus à l’extérieur, jouent au foot, par exemple, ce qui favorise le sens de l’orientation. Ces normes que nous reproduisons inconsciemment forgent nos aptitudes et nos personnalités en tant que filles ou garçons. Rien n’est définitif…

Les clichés creusent-ils les inégalités entre les sexes ?
En quelque sorte. Les stéréotypes sur les hommes et les femmes laissent croire que l’ordre social reflète l’ordre biologique. A force d’affirmer que les filles ne sont pas douées pour les sciences, seulement 25% d’entre elles s’orientent vers des écoles d’ingénieurs ! Le nombre insuffisant de femmes dans les postes à responsabilité est aussi une des conséquences de la diffusion du cliché selon lequel les hommes sont plus aptes au pouvoir. Des idées reçues qui créent des blocages et orientent nos choix.

Le cerveau n’a donc pas de sexe ?
Les hommes et les femmes ont des cerveaux différents quant au contrôle des fonctions liées à la reproduction sexuée. Mais en ce qui concerne les fonctions cognitives (intelligence, mémoire, attention), la diversité entre les individus d’un même sexe est plus forte qu’entre les sexes ! La mise à jour du concept de « plasticité» cérébrale peut, nous l’espérons, faire évoluer les mentalités pour plus d’égalité dans la vie privée et sociale.
Amandine Grosse         Le 01/08/2011
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