Géopolitique des islamismes

Samedi 3 décembre 2016, 10H15
médiathèque Anne Fontaine, Antony 
8 rue Maurice Labrousse, à 1mn. de la gare d’Antony (parcours fléché), RER ligne B (20 mn. de la gare du Nord)

Cycle: LE MONDE EN QUESTION
organisé et animé par RENCONTRES ET DÉBATS AUTREMENT 

THÈME : Géopolitique des islamismes – Comment comprendre ce qui nous arrive ?

INVITÉE : Anne-Clémentine Larroque, maître de conférences en Relations internationales à Sciences-Po Paris et auteure de « Géopolitique des islamismes », PUF, collection «Que sais-je», 2016, et de Sortir du Bataclan avec Charles Nadaud  et Jean-Baptiste Guégan 
Editions Bréal - Hors collection Bréal 28 octobre 2016.

Comment s’y retrouver entre Frères musulmans, salafistes, whahabistes, soufistes, entre chiites et sunnites ?
Comment bien distinguer l’islamisme missionnaire, l’islamisme politique et l’islamisme terroriste et djihadiste ? Faire la part de la religion  et de la politique? L’analyse d’Anne-Clémentine LARROQUE est éclairante.
Qu’il soit politique, terroriste ou missionnaire, l’islamisme grandit, mais l’idée d’une internationale islamiste est bien une illusion. Prendre en compte cette pluralité est indispensable à la compréhension de ce phénomène.
Pour comprendre les origines et fondements des doctrines islamistes il faut surtout passer par une étude géographiquement et politiquement ancrée de chaque mouvance. 

 
Extraits d’interview d’A.-C. LARROQUE :

Beaucoup de personnes confondent islam, islamisme et djihadisme. À quoi cela correspond-il en réalité ? 
« L’islam correspond à la religion alors que l’islamisme, c’est une idéologie politique et religieuse qui a pour but de promouvoir la pensée islamique dans le monde entier et renforcer l’Oumma (la communauté des musulmans). On distingue trois courants différents : l’islamisme missionnaire (prêche), l’islamisme réformiste (ou politique) qui cherche à prendre le pouvoir de façon légitimiste via les élections et l’islamisme violent, le djihadisme, où le but est de lutter contre les impies et les mécréants en utilisant la violence, la guerre, les attentats. »

Quels groupes retrouve-t-on dans ses différents courants ?
« D’une part, on retrouve les salafistes missionnaires et le Tabligh, mouvement né en Inde dans les années 20 et qui s’est exporté ensuite aux États-Unis et en Europe. C’est un groupe de prédicateurs qu’on a beaucoup vu dans les cités dans les années 70.

Du côté réformiste, on retrouve les Frères musulmans, dont l’objectif est d’utiliser le politique pour accéder au pouvoir. On peut également parler de l’AKP en Turquie ou Ennahdha en Tunisie. Le pouvoir iranien s’inscrit aussi dans cette lignée, même s’il était révolutionnaire à l’origine.

Enfin, pour les djihadistes, il y a les Gamaat Islamiya, nées en Égypte à la fin des années 70, Al-Qaida et ses satellites …L’État islamique, lui, opère aujourd’hui en Irak, en Syrie et au Liban. Son origine remonte à 2006, lorsqu’Al-Qaida en Irak a fait scission d’Al-Qaida pour devenir un mouvement encore plus violent et radical, le futur EI. »
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Peut-on parler d’une sorte de croisade à l’envers de la part des djihadistes ?
« Sans parler de choc des civilisations, il y a une réaction au modèle occidental, afin de montrer qu’il y a une alternative au monde globalisé. Par exemple, la création du dinar islamique est là pour montrer qu’il n’y a pas que le système du dollar. Il y a aussi une volonté de faire peur à ce monde-là. Ils estiment leur violence légitimée par celle que crée le modèle international. »

Pourquoi l’EI attire-t-il autant de combattants ?
« L’EI communique très bien. On se demande même s’il n’a pas des publicitaires. Il utilise l’imagerie apocalyptique, avec la mise en scène des décapitations par exemple. Aussi, il met en avant des djihadistes occidentaux, parlant très bien anglais, qui font le lien avec ce monde. En fait, il offre une vision manichéenne du monde. Il y a ceux qui sauvent l’Oumma et les autres. Ça soulage les jeunes qui trouvent le monde trop complexe. On peut mettre en scène sa vie, devenir un héros. C’est quelque chose qui met le doigt sur le désenchantement de la société actuelle. »

L’EI a-t-il supplanté Al-Qaida ?
« Si Al-Qaida est toujours bien implanté, l’EI est devenu le groupe le plus puissant. Il compte 30 000 hommes, des banques, soulève des impôts, a du pétrole et jusqu’à mi-2013, était financé par des pays du Golfe, le Qatar, les émirats, même si officiellement ce n’est plus le cas…
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