Philosophie et psychanalyse

Mardi 11 MAI 2010 à 19.15 H

Au CAFÉ DU PONT NEUF

 INVITÉ : GUNTER GORHAN

THÈME : PHILOSOPHIE ET PSYCHANALYSE ()

Notre invité est GUNTER GORHAN, philosophe dans la cité, un des trois animateurs au café des PHARES à la Bastille, et ceci depuis que Marc Sautet a initié ces rencontres en 1992. Il a participé à fonder d’autres cafés philo ailleurs en Europe : à Dusseldorf, Essen Vienne, ou Zurich.

Comme animateur de philo et agitateur de pensée il intervient aussi dans les lycées ou les foyers pour jeunes travailleurs à Créteil ou Bondy, et dans des lieux aussi inhabituels qu’un hôpital psychiatrique, celui à Aulnay-sous-Bois p.ex., ou dans des maisons de retraite, et parfois dans des théâtres. Il est aussi écoutant et formateur à SOS suicide.

Voilà pour la philosophie. Quant à la psychanalyse, il en a fait une lui-même selon les préceptes de Wilhelm Reich. Il a aussi été traducteur de Freud, c’est dire qu’il en connaît un bout. Mais s’il intervient ici ce n’est pas en expert mais en  pratiquant de l’analyse comme de la philosophie, philosophie qu’il a embrassée après avoir étudié et enseigné le droit à la Sorbonne. Il fait partie des personnes qui disent « la psychanalyse m’a sauvé », peut-on mieux dire ? En somme pour lui la pratique de la philosophie est une continuation salutaire de l’analyse.

C’est sûr, on ne guérira pas en lisant un manuel de philosophie, mais ce qui vous apprend la philosophie c’est le questionnement. Ce questionnement ou cette maïeutique tel que SOCRATE l’a pratiqué dans la cité d’ATHÈNES en s’adressant aux jeunes aristocrates qui se mêlaient de politique. Il leur a demandé pourquoi ils pensaient ce qu’ils pensaient, pourquoi ils prônaient la guerre au lieu de la paix p.ex. Cette maïeutique socratique vous aide à chercher le SENS et surtout à les motivations de vos actes. C’est le fameux « CONNAIS-TOI TOI-MÊME » de Socrate ou le « OSE SAVOIR ! » de Kant.

Depuis que Marc Sautet les a initées les NOUVELLES PRATIQUES DE LA PHILOSOPHIE (NPP) applique cette maïeutique – ce dialogue didactique entre celui qui interroge et celui qui est questionné. Il est clair qu’avec un dialogue qui vous pousse dans vos retranchements, on arrive à clarifier certaines situations,

- p.ex. quand quelqu’un ne sait plus pourquoi il supporte un harcèlement moral au travail

- ou pourquoi il s’accroche à un partenaire qu’il n’aime plus, etc…

Mais ce qui distingue ces Nouvelles pratiques de la philosophie de la CURE PSYCHANALYTIQUE, c’est la différence entre LA RATIO et L’INCONSCIENT. Les NPP font essentiellement appel au raisonnement logique, à la RATIONALITÉ, alors que la PSYCHANALYSE fait appel à L’INCONSCIENT. Et c’est le génie de Freud d’avoir introduit la LIBRE ASSOCIATION dans la cure, qui fait ressortir ce qui est refoulé, donc inconscient au malade.

Peut-être c’est NIETZSCHE qui a le mieux pressenti le rôle que joue l’inconscient dans notre vie quand il dit : TU NE DEVIENDRAS JAMAIS QUE CE QUE TU IGNORES DE TOI-MÊME ». Ce qui veut dire en clair: ce que tu refoules revient irrésistiblement et l’emporte sur tes raisonnements ou rationalisations.

Et lorsque Michel Onfray en nietzschéen inconditionnel reproche à Freud d’avoir ignoré ou fait semblant d’ignorer les intuitions de Nietzsche ou de Schopenhauer sur l’inconscient, il a peut-être raison sur ce point.

Il y a un autre philosophe, et non des moindres, c’est Jean-Paul SARTRE qui lui aussi a critiqué Freud, tout en étant probablement fasciné par lui, puisqu’il a écrit deux scénarios, dau total 500 pages, pour un film que John Huston a voulu tourner sur la VIE de FREUD, un film qui n’a jamais vu le jour.

Sartre, le philosophe de l’existentialisme et de la liberté, imprégné de «cartésianisme », a forcément eu des réserves par rapport à l’inconscient et la pensée psychanalytique qui pour lui était une « pensée molle », parce qu’elle ne s’appuie pas sur une logique dialectique. Il reprochait aux psychanalystes et donc à Freud leur ambivalence en interprétant le complexe d’Œdipe p.ex. par une chose et son contraire : une fois par l’amour de la mère, une autre fois par la haine de la mère ou encore par la fixation à la mère. Sartre ne niait pas le complexe d’Œdipe – et pour cause ! - mais pour lui il était structuré selon une logique interne.

Toujours est-il que personne d’autre avant FREUD a inventé la cure psychanalytique et que cette cure peut aider les patients à se reconstruire. Cette Construction de soi ou « Sculpture de soi » - pour citer le titre d’un livre de MICHEL ONFRAY - n’est évidemment jamais finie et elle peut trouver des relais dans la philosophie. Car ce que la philosophie et la psychanalyse ont en commun c’est qu’elles nous font prendre conscience de notre conditionnement, qui commence par papa et maman, bien sûr, mais se prolongent tout au long de notre vie par l’environnement social dans lequel nous sommes plongés.

Et c’est une tâche jamais terminée de questionner le SENS et le POURQUOI des choses - comme le font d’ailleurs les enfants – et à apprendre à penser par nous-mêmes et à agir en conséquence.

Comme dit le philosophe et psychanalyste MIGUEL BENASAYAG, notre précédent invité : CONNAÎTRE, C’EST AGIR. C’est à quoi vous invitent ces RENCONTRES ET DEBATS AUTREMENT qui mêlent les débats de société au débats philosophiques, qui nous semblent essentiels, surtout en temps de CRISE telle que nous la vivons.


 Et je passe la parole à Gunter Gorhan qui connaît bien Miguel Benasayag pour avoir mené des actions auprès des SDF avec lui et son collectif MALGRÉ TOUT. En quelque sorte il est l’incarnation de la PSYCHANALYSE et de la PHILOSOPHIE EN ACTE. ()

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